Victoriaville – Il déambule sur les allées avec un grand chapeau ombrageant son visage. Quand il s'approche pour l'entrevue, il pointe trois jeunes pros venant d'effectuer leur coup de départ et lance: «Ils croient qu'ils sont protégés avec leur casquette…»
Daniel Talbot ne juge pas, il commente. Le professionnel, dont le nom circule depuis de nombreuses années sur la scène du golf québécois, souhaite juste que ceux et celles marchant dans ses traces n'aient pas à subir, un jour, les mêmes délicates opérations chirurgicales qu'il a lui-même connues.
«Moi, précise-t-il, je m'en suis tiré avec quelques cicatrices qui s'estompent. Mais j'ai vu d'autres patients qui sont sortis de leurs opérations, pour le même cancer que j'ai eu, pas mal plus amochés. Certains sont défigurés.»
Prédisposition
Le printemps dernier, Daniel Talbot faisait les manchettes non pas pour ses exploits de golfeur, comme ce fut longtemps le cas, mais pour son combat contre le cancer. Son histoire est donc passablement connue: pas moins de cinq opérations pour traiter un cancer de la peau à son visage; un cancer appelé carcinome basocellulaire et qui s'attaque plus spécialement aux vaisseaux; des photos de lui avec ses cicatrices circulent alors dans les médias et sur les réseaux sociaux où il raconte son aventure pour sensibiliser les gens.
«J'étais vraiment prédisposé à attraper un tel cancer», mentionne le pro de 63 ans rencontré à Victoriaville, cet été, lors de la Coupe Canada Sani Marc. «Roux, les yeux bleus, je serais resté à l'ombre toute ma vie que j'aurais quand même eu de fortes possibilités d'être atteint, comme me l'ont spécifié les spécialistes.»
Des prédispositions génétiques, certes, mais quand ton travail consiste à jouer au golf et à être continuellement exposé aux traitres rayons du soleil, cela n'aide guère.
«En vacances ou quand j'allais m'entraîner en Floride certains hivers, raconte-t-il, jamais j'allais prendre des bains de soleil à la plage ou sur le bord de la piscine. Je n'ai jamais été un adepte de cela. Donc c'est le golf, rien d'autre. C'est à force de me promener sur les allées que le cancer s'est développé.»
Prévention
On en revient donc aux jeunes pros qui venaient de s'élancer, tout près, et qui débutaient leur partie. Tous arboraient leur casquette avec logo de fabricants de bâtons, ils marchaient tête haute et, bien sûr, leur visage bien exposé au soleil. Daniel Talbot, lui, les regardait assis dans une voiturette, bien à l'ombre sous un arbre et toujours son large chapeau sur la tête.
«Je parle de ma maladie parce que je veux sensibiliser mes jeunes collègues, explique-t-il. Souvent, je leur refile de la crème protectrice. Je m'en mets régulièrement pendant une partie et à chaque fois, j'en offre à mes compagnons de jeu.
«Même si cela n'a pas été facile pour moi, je m'en suis tout de même assez bien tiré. Mais comme je vous l'ai dit, j'en ai vu d'autres qui ont eu moins de chance.»
Ce que l'on devine de ses propos, c'est qu'il y a actuellement de belles carrières qui débutent chez certains golfeurs et ce serait vraiment dommage que leur métier soit la cause de problèmes de santé futurs. Il souhaite juste leur rappeler d'être prudents et de ne pas hésiter à prendre les bonnes mesures de prévention.
«J'ai eu au total sept chirurgies. Cinq pour enlever les tissus cancéreux et deux pour la reconstruction esthétique. Je n'ai pas souffert et je m'en suis assez bien tiré même si cela était très stressant à vivre.»
Et ce stress, alors que la saison se termine, il ne veut pas que le vivent les jeunes pros qui s'en iront bientôt s'entraîner en Floride comme lui-même le faisait auparavant. Et cela, c'est bon pour tous les golfeurs et golfeuses, bien sûr.