Sainte-Julie – Dès le début de l'entrevue, Marie-Thérèse Torti y va franchement, sans détour: «Le golf m'a sauvée!», affirme-t-elle, la gorge nouée.
Il y a une quinzaine de jours, Golf Québec annonçait que la golfeuse amateur couronnée à plusieurs reprises sera intronisée au Temple de la renommes du golf québécois. Toute une bonne et belle nouvelle pour elle qui, il y a quelques mois, en avait reçue une pas très réjouissante.
«Il y a neuf ans, explique-t-elle, on m'a diagnostiqué un cancer du sein. Les traitements ont marché et je suis repartie à fond. En octobre dernier, toutefois, des cellules cancéreuses ont été découvertes de nouveau. Depuis décembre, j'ai des traitements de chimiothérapie et d'immunothérapie à toutes les trois semaines. Ce sera ainsi jusqu'en février prochain.
«Mais je n'ai pas cessé le golf pour autant, continue-t-elle, déterminée. J'adore passer des heures et des heures à m'entraîner, cela m'a toujours fait du bien. Alors dès que je récupère à la suite de mes traitements, je vais au golf. C'est pour cela que je dis que c'est le golf qui m'a sauvée!»
Et elle ne va pas au golf juste pour s'entraîner, loin de là, mais aussi pour vaincre! Pour mettre encore et encore son nom sur un trophée. C'est une compétitrice née, passionnée par le goût de la réussite, de la victoire.
Quand nous l'avons rencontrée, il y a deux jours, il a fallu faire un arrêt obligatoire dans le lobby de son club de golf, la Vallée du Richelieu, devant une immense plaque sur laquelle apparaissent tous les noms des champions et championnes de ce club depuis sa fondation. Et bien le nom de Marie-Thérèse Torti y est inscrit 21 fois dont 18 de suite!
«Samedi prochain, souligne-t-elle, c'est la dernière ronde du championnat de club de cette année. Actuellement, c'est moi qui mène par 2 coups.»
Mais ce ne sont pas juste ses nombreuses victoires locales qui ont joué en sa faveur. Dans le communiqué de presse émis par la Fédération pour annoncer son intronisation, cela a pris deux longs paragraphes pour énumérer ses faits d'armes pendant toutes ces années de compétition (golf-quebec-torti)!
Dans le même communiqué, on y signale également son dévouement bénévole pour son sport. Et pendant l'entrevue dans le resto du club, on remarque à l'extérieur un groupe de jeunes qui s'entassent près du vert de pratique. Dès lors, Mme Torti les pointe du doigt: «Ça, lance-t-elle, tous ces jeunes, ça j'en suis fière. J'ai été de ceux et celles qui ont relancé le programme junior ici, à la Vallée du Richelieu, il y a une dizaine d'années. Depuis, nos jeunes figurent parmi les meilleurs et ils sont toujours plus nombreux.»
Puis l'entrevue reprend et, modestement, elle relate sa carrière. On apprend alors que cette mère de famille de 58 ans, consultante en informatique, a commencé à jouer au golf à l'âge de 14 ans, au moment où son père a lancé l'idée de pratiquer ce sport en famille. Et comme le talent y était chez cette ado qui a tout de suite eu la piqûre du golf, elle s'est lancée dans les tournois amateurs.
Longue cogneuse, elle n'hésite pas à dire aujourd'hui que Debbie Savoy-Morel et Jocelyne Bourassa, avec qui elle est devenue amie, l'ont grandement aidée à amener son jeu à un niveau supérieur. «Elles m'ont tellement aidée à améliorer mon jeu court, là où se joue souvent la victoire», précise-t-elle.
On apprend aussi que grâce à cette carrière de compétitrice amateur, elle a vécu de grands moments («Ma participation au US Open senior à Chicago fut quelque chose de mémorable!») et elle a joué dans chacune des provinces canadiennes en plus de faire de nombreuses escapades de golf à l'étranger (Je n'ai pas marché, à St. Andrews, j'ai flotté!»).
Elle révèle aussi qu'il y a eu des moments plus difficiles comme lors de ce championnat de club à la Vallée du Richelieu où tout s'est soudainement effondré alors qu'à cette occasion, elle comptait sur l'aide de son père comme cadet.
«Je jouais bien quand, tout à coup, je me suis mise à faire des shanks! Subitement, sans savoir pourquoi, je n'ai plus été capable de frapper un seul coup sans que ce soit un shank. J'ai abandonné et je l'ai fait alors que mon père était mon cadet… J'étais désespérée. Il ne m'a fait aucun reproche, il m'a juste dit que je devais apprendre de cet échec, bref, il m'a rassurée.»
Ce fut donc (et ce n'est pas fini, nous dit-elle, persuadée) de belles années de golf qui seront bientôt soulignées lors d'une soirée spéciale dont la date reste à déterminer. Durant l'échange, on perçoit qu'elle est très honorée que son nom figure maintenant parmi les grands et grandes du monde du golf au Québec.
«Et en plus, glisse-t-elle, de la mélancolie dans les yeux, cela survient l'année où Jocelyne nous a quittés… Elle serait tellement contente pour moi, j'en suis convaincue.
«Je me rappellerai toujours de ce dimanche de 1973, alors que j'avais 10 ans et que je n'avais jamais touché à un bâton de golf. Ce jour où mon père avait décidé de nous amener voir un tournoi au club municipal de Montréal, celui où Jocelyne Bourassa est passée à l'histoire. Est-ce le destin qui m'a placée là, moi qui ne jouais pas au golf, pour être témoin de l'exploit d'une athlète qui deviendrait plus tard une grande amie?»
C'est sûr que lors de la cérémonie, elle aura une pensée pour Jocelyne Bourassa et bien d'autres personnes qui l'ont aidée ou accompagnée au fur et à mesure qu'elle signait ses victoires. Nous osons alors lui demander quelle sera la première de toutes ces personnes vers qui elle aura une pensée spéciale.
Et sans aucune hésitation elle émet: «Mon père…»
Puis un silence s'installe. Elle essuie ses yeux et reprend: «Vous savez lors du championnat où les shanks sont apparus, je me sentais tellement mal d'avoir abandonné, de l'avoir fait alors qu'il était mon cadet. Je croyais l'avoir déçu mais il m'a encouragée et m'a rappelé qu'il fallait apprendre de ces situations. Par la suite, lors d'une autre compétition, je m'étais blessée après un élan, au point tel que je n'arrivais même pas à me pencher pour ramasser ma balle ou la placer sur un tee. Mais j'ai quand même terminé, je n'ai pas abandonné. Je n'ai plus jamais abandonné lors d'un tournoi. Et oui, c'est à mon père que je vais penser…»