Québec – Il y a de ces personnes qui, à leur manière, ont marqué leur époque, ont marqué l'histoire, et dont il ne faut surtout pas qu'elles tombent dans l'oubli. De l'avis d'André Maltais, le pro Jules Huot, dominant dans les années 30 et 40, est de ce groupe et c'est pour cela qu'il vient d'écrire un livre sur lui, pour que jamais la mémoire de cet homme, le pionnier du golf au Québec, ne s'éteigne.
«Il y a quelques années, raconte André Maltais, j'étais attablé avec plusieurs professionnels de golf et j'ai, à un moment donné, lancé le nom de Jules Huot. Peu d'entre eux le connaissaient et je trouvais cela dommage. Je trouvais cela triste qu'un homme qui a été le premier Canadien français à se démarquer au golf puisse disparaître à jamais sans qu'on ne se souvienne de ses prouesses.
«Quelque temps auparavant, continue-t-il, lors d'une journée où on lui rendait hommage, au club Laval-sur-le-Lac, on m'avait demandé de parler de lui. Après mon petit discours, Jocelyne Bourassa m'a dit que c'était intéressant et qu'il fallait écrire sur Jules Huot. Quand j'ai constaté plus tard que plusieurs pros ne le connaissaient pas, j'ai compris que Jocelyne avait raison qu'il fallait écrire sur Jules Huot, raconter sa vie, lui qui a été quelqu'un d'unique, hors du commun.»
Mentor et ami
Nous avons discuté à deux reprises avec André Maltais, d'abord au salon du golf de Montréal puis, une semaine plus tard, à celui de Québec, pour parler de son livre intitulé Jules Huot, coup de départ du golf québécois. À chacune de ces rencontres, nous avons eu affaire à quelqu'un qui, visiblement, voue une grande admiration envers le golfeur qui a été son mentor et son ami.
À 72 ans, André Maltais vient d'accomplir quelque chose de grand pour le golf au Québec en immortalisant les exploits de Jules Huot et en confiant quelques-uns des beaux et grands moments qu'il a passés en sa compagnie. C'est avec beaucoup d'émotions qu'il répond aux questions, visiblement touché et pas du tout blasé de parler de cet homme auprès duquel il a été cinq ans assistant, au club Laval-sur-le-Lac, avant de lui succéder en 1970.
«Professionnellement, lance tout de go l'auteur, ça a été les cinq plus belles années de ma vie! Et je ne suis pas le seul à garder une telle impression. La plupart des pros de golf qui ont côtoyé Jules Huot vous diront la même chose. M. Huot était, je le répète, un homme hors du commun. Au golf, en affaires ou en amitié, c'était toujours le même homme. Il agissait toujours en fonction du golf, peu importe le geste posé.»

Ces paroles dites, André Maltais sourit à pleine dents et on devine qu'une anecdote, un souvenir, associés à cette image, lui reviennent et qu'il tient à les évoquer. Ce qu'il fait, les yeux brillants: «Un jour, à la boutique, un membre me demande un paquet de trois balles. Je les prends machinalement sur le comptoir et les remets au client de façon tout aussi machinale. Après le départ du client, M. Huot s'approche et me fait remarquer que j'avais agi de façon très spontanée et rapide avec cette personne, ce qui n'était pas correct car si, au golf, je m'étais élancé de cette même manière rapide, peu appliquée, j'aurais raté mon coup…»
Le sourire fait alors place à un éclat de rire. Cet amusement et cette passion avec lesquels ils nous entretient, émergent des pages de son bouquin. En le feuilletant, on a l'impression que l'auteur est juste derrière nous et nous chuchote les lignes qui défilent sous nos yeux. Il semble le faire avec grand plaisir, avec le même enthousiasme que celui perçu lors des entrevues.
Une grande famille
Dans ce livre faisant état des exploits de celui considéré comme le Maurice Richard du golf au Québec, on y apprend entre autres que Jules Huot a été le premier et demeure, jusqu'à maintenant, le seul Québécois à gagner sur le circuit des pros aux États-Unis, le premier à remporter le Championnat canadien des professionnels, qu'il a été plusieurs fois champion des pros de la province, qu'il a participé au Tournoi des Maîtres et donc, par la même occasion, côtoyé les grands de l'époque, les Hogan, Snead, Sarazen et compagnie.
En plus de 222 pages, André Maltais s'applique à relater tous les grands moments de la carrière de ce phénomène du golf, pas plus de 5 pieds et 5 pouces, mais habité par le désir constant de gagner. Un livre bien construit, agréable et facile à lire, qui nous fait découvrir un passé golfique du Québec plus riche qu'on pouvait le croire. À sa lecture, on ne peut qu'être inspiré par les prouesses de cet homme, mais aussi, du même coup, de celles de sa famille élevée à Boischatel, sur la côte de Beaupré.
André Maltais nous rappelle que les Huot ont grandi à 400 verges du défunt Kent Golf Links et à quelques kilomètres du Royal Québec… Il est clair qu'il ne pouvait parler de Jules Huot sans glisser un chapitre sur sa famille, sur ses sept frères qui ont tous fait leur marque au golf. D'ailleurs, au Royal Québec, mentionne l'auteur, c'est depuis les années 1930 que la dynastie des Huot se succède au poste de professionnel, actuellement occupé par Nicolas Huot.
«À quelques reprises, dit-il, lors d'importantes compétitions, il arrivait de voir l'un des Huot gagner et être suivi de près par quelques-uns de ses frères. En 1949, Jules est sorti vainqueur du Championnat de la PGA canadienne, pendant que Roland prenait la deuxième place et que Rodolphe terminait au 5e rang. En 1947, c'est Rodolphe qui gagnait alors que Jules finissait deuxième et que Roland s’emparait de la quatrième place!»
Maintenant enseignant au Club et Académie de golf LongChamp, à Sherbrooke, André Maltais a eu une excellente idée en immortalisant sur papier la carrière de Jules Huot et en mentionnant quelques faits historiques reliés à sa célèbre famille. C'est même encourageant de plonger dans ces histoires du passé, de s'inspirer de ces personnages hors du commun, comme il dit, pour regarder l'avenir du golf au Québec. Le talent est là, il l'a toujours été, et il est possible qu'il se manifeste sur la scène internationale. Jules Huot et sa famille en sont la preuve, confirment qu'on peut y croire.